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24 décembre 2012 1 24 /12 /décembre /2012 12:16

Lundi 7 janvier 2013. Je passe la porte de la salle des profs. Une affiche m'interpelle sur le panneau. Voici l'affiche en question retranscrite ici :



PROJET DE CLASSE EXPERIMENTALE

 

Chers collègues,

 

A la rentrée prochaine, je souhaite constituer une équipe de professeurs volontaires pour mettre en place une classe « expérimentale » basée sur les principes suivants :

  • Une évaluation de tous les devoirs sur 20 points mélangeant de nombreux critères. (Nous pourrions alors faire des moyennes pour pouvoir avoir des avis tranchés sans devoir entrer dans les détails).
  • Un emploi du temps figé en tranches d'une heure avec un seul prof, d'une matière par heure avec une classe uniforme tout au long de la semaine. Nous pourrions même envisager que cet emploi du temps soit le même sur l'année scolaire entière.
  • Un quota minimum de devoirs à la maison. Les temps au collège seraient avant tout des moments où nous pourrions exposer à toute la classe des connaissances, les élèves travailleraient alors chez eux.
  • Un redoublement pour les plus mauvais de la classe en terme de moyenne générale plutôt que le système actuel permettant des parcours personnalisés sur plusieurs années.
  • La fin de tout lien entre nos élèves de 6e et les CM2 du secteur et donc de tout travail pédagogique ou de suivi régulier entre les PE et nous. Tout au plus une demi journée de visite dans l'année et une réunion de liaison en fin d'année.
  • Des classes constituées par niveau pour que les meilleurs ne soient pas freinés par ceux qui ne veulent pas travailler.


D'autres idées pourraient venir enrichir ce projet mais il est déjà ambitieux sur ces idées tant les réticences au changement sont grandes.
Nous devrons nous battre auprès de l'institution et franchir de multiples obstacles. Il nous faudra convaincre à tour de rôle : nos IPR, l’inspection académique, le conseil général, le rectorat, les parents d'élèves...

Attendons nous aussi à être montrés du doigt par certains collègues qui feront tout pour que ce projet ne se fasse pas.

 

Si vous êtes intéressé, inscrivez vous ici :

 

 

 

 

Je l'ai relu, une fois, deux fois, trois fois !... avant d'ouvrir mon casier, histoire de voir si tout était bien normal. Au dessus de la pile mal rangée que j'avais laissée avant de partir en vacances, un document « Emploi du temps de la période ». J'y découvre quelques cours disciplinaires le matin par tranches de 45 minutes et des tranches de 2 heures d'atelier l'après midi. J'y apprends que je vais travailler avec mon collègue de technologie sur la construction d'une maison miniature économe en énergie le lundi, que mes 6e travailleront avec les CM2 de l'école d'en face pour la page « sciences » du journal numérique que nous avons mis en place dans le réseau. Chose impensable, cet emploi du temps comprend des temps de concertation, de réunions de cycle et de suivi des élèves.


La porte s'ouvre ! C'est le documentaliste ! Ouf ! Enfin quelqu'un qui pourra me renseigner sur ce qu'il se passe. Je l'interroge sur cet emploi du temps. Il me regarde comme si je débarquais d'une lointaine planète même pas référencée dans les livres de son CDI. Il ne me répond même pas et préfère me parler de l'organisation de l'accueil quotidien du matin dont il est visiblement un des coordonnateurs.

Qu'a-t-il pu bien arriver ? C'était donc ça la fin du monde ?
Une faille spatio-temporelle semble avoir opérée. Le monde de l'école semble être devenu celui dont je rêvais. Et tout cela paraît naturel à tout le monde. La normalité a changé, l'affiche « classe expérimentale » est là pour me le rappeler.

Ce n'est donc plus à nous de nous battre de dossiers en dossiers, de critiques en critiques face à une inertie complète face au changement, face au progrès ?
Plus besoin de se justifier à longueur de temps sur des choix pédagogiques différents.
Voilà que la situation est inversée.


Bien sûr tout ceci est faux. Mais est-ce si absurde ?
Aujourd'hui, certains voudraient nous faire croire que l'institution scolaire dans son ensemble a depuis longtemps basculé dans l'école voulue par les « pédagos ». Mais c'est bien une organisation entière qui répond plutôt au conservatisme, au modèle transmissif et à la sélection élitiste qui est en place et derrière laquelle certains campent. Les marges de manœuvres sont très faibles et pour s'en emparer, il faut lutter, se justifier, faire face aux regards défiants. Réussir à mettre en place une classe « sans notes », à apporter un peu (mais vraiment un peu) de souplesse dans les emplois du temps relève d'une concordance de situations favorables. Et, quoiqu'il arrive ce n'est jamais une partie de plaisir.

Aujourd'hui nous sommes censés refonder... alors allons y, pour que ce collège des temps diversifiés, de l'évaluation positive, du travail en équipe, de la coopération inter degrés  ne soit plus une utopie mais une réalité dans quelques années. La refondation sera culturelle ou ne sera pas.

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commentaires

L
Oui, oui, oui !! :-)
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